jeudi 10 décembre 2015

Comment être un vieux con la semaine d'un nouveau Star Wars

Plus qu'une semaine avant la sortie du premier épisode de la nouvelle trilogie Star Wars. Un engouement mondial qui est l'occasion de revenir sur l'engouement mondial d'il y a 15 ans, pour la sortie de la Menace Fantôme, et de voir à quel point ce film (pas bien terrible, il faut l'admettre) a changé radicalement votre mode de vie. Si, si. 

Retour vers le futur
Dans une galaxie très lointaine, un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas comprendre. 1999, plus précisément. A cette époque lointaine, on était sous Windows 95 ou 98, internet rentrait timidement dans les foyers belges, les parcs informatiques se développaient enfin, les premiers iMac débarquaient sans lecteurs de disquette, etc.
Les plus nostalgiques se souviendront d'autres éléments clés de l'internet de l'époque comme ICQ, Infonie, et Wanadoo, du bruit d'un modem se connectant à votre ligne téléphonique, des chat-rooms, et d'une bonne recherche sur Altavista. Yahoo était encore très cool.
Les plus geeks-nostalgiques par contre se remémoreront les warez, les cracks sur Astalavista, et les cargaisons de cd-r Verbatim qu'ils achetaient pour graver en vitesse 2x la musique de groupes et artistes vendant encore des millions de copies chaque année. 

Personne ne connaissait vraiment Google, qui était encore en version beta. 

Et quel rapport avec l'ancien nouveau Star Wars dans tout ça? Le film était tellement attendu que certains Belges n'ont pas hésité à traverser l'Atlantique pour aller visionner le film avant sa sortie européenne. L'évènement cinématographique de l'année allait faire renaître une curieuse habitude relativement courante dans certains cinémas new yorkais des années 80 : les screeners, ces types louches qui entraient dans une salle obscure avec une caméra afin d'y filmer le film et revendre sous le manteau des crasseuses copies Betamax et VHS à $3. 




La Menace Fantôme du Piratage 2.0 
Voilà qu'un screener assiste au nouveau Star Wars, et arrive à en filmer d'une qualité convenable au point que des copies - sur 2 cd-r, 700Mo oblige, les DVD-r c'était encore de la science fiction - commençaient à circuler rapidement. Un "rapidement" très relatif car la science fiction de l'époque, c'était aussi transférer des centaines de mégas octets via Internet. Les screeners du nouveau Star Wars se distribuaient de la main à la main, pas via un software de file sharing. N'oublions pas que 1999, Napster venait seulement de voir le jour, et échanger des volumineux fichiers mp3 de 5Mo n'était déjà pas en soit une sinécure. 

Philips, Sony, Teac et compagnie arrivaient enfin à commercialiser des graveurs cd-r abordables : 500€ (20.000BEF), même des students pouvaient en rêver! Et ces students correspondaient justement au nouveau public visé par ce nouveau Star Wars, car les nostalgiques de la première trilogie ne suffiraient - déjà - pas à rentabiliser la superproduction de Georges Lucas. Mais rappelons tout de même que les marketeurs/créatifekes de l'époque ont méchamment foiré leur cible. Entre un Jar Jar Binks rasta-con et un Darth Maul sensé être plus cool que Darth Vador, le public rajeunis ne se sera pas fait avoir par ces nouveaux guignols.


Wachowskis, ça vous dit quoi encore?
L'autre caractéristique de ce public rajeunis est son intérêt grandissant pour les nouvelles technologies de l'époque. Bien avant les smartphones, l'ADLSL abordable et le streaming, le futur le plus fascinant était illustré dans une autre trilogie, celle qui débuta par la véritable sensation visuelle au succès écrasant tout sur son passage : The Matrix




Il faut dire que le film de l'époque avait quelques éléments clés bien plus parlant à cette nouvelle génération : de l'underground, de la manipulation politique, de la réalité virtuelle, des hackers qui prennent le contrôle, des héros avec des nicknames. La Force se prenait une méchante claque dans la gueule par un finfrelet renfermé s'échappant de sa prison corporate, et devenant grâce à l'informatique un badass ninja déclarant la guerre à des méchants au look conformiste. 




OK, Star Wars, on a compris, mais on voulait voir Matrix. On voulait être Neo, pas Anakin Skywalker. On voulait en prendre plein la vue d'effets spéciaux nouveaux, pas plein les oreilles de ce vieux John Williams.
La demande créant l'offre, sous le manteau et surtout dans les cartables, on trouvait donc rapidement des cd-r de Matrix. Pas de fichiers avi à lire avec VLC à cette époque. C'était 2 fichiers mpeg à lire avec Windows Media Player. Et là, les moins de 20 ans découvrent que Windows a eu un jour un media player...



700Mo et pas plus
Les fans de musique avaient Napster, une bibliothèque magistrale facilement accessible, à lire avec Winamp. Les fans de cinéma avaient toujours un internet autant à la ramasse. Il était donc nécessaire de réduire la taille des fichiers video, en développant des formats compressés de qualité (avi donc, les fameux 'divx', terme que plus personne n'utilise aujourd'hui). Et la plupart de ces fichiers videos faisaient entre 650 et 700Mo, taille maximale du format cd-r. Ca reste pénible à partager quand la moyenne de transfert de l'époque atteint les 20ko/sec pour les plus chanceux. Evidemment en Belgique, nous étions à la préhistoire par rapport aux campus américains ou scandinaves, dont les vitesses de connexion poussent des jeunes développeurs à créer des software de partage de masse tel que audiogalaxy, soulseek, mais aussi eMule, qui fût un temps appelé Morpheus, comme le mentor d'un certain Neo, l'élu dans Matrix.

Rapidement tout augmente. La qualité des divx, la vitesse de download, la quantité de films piratés, le spam, les gens avec internet à la maison, et les lois qui sont sensée réguler tout ça. 



15 ans plus tard
15 années sont passées, nous avons les réseaux sociaux, le streaming 4K, des catalogues Netflix, Hubu et compagnie, 100Mo/seconde à la maison, un mini ordinateur constamment connecté dans notre poche. Et surtout très bientôt, un nouveau Star Wars.

Il est fort probable que ce nouvel épisode de la saga se retrouve sur vos ordinateurs avant même sa sortie en salle, ou du moins peu de temps après. En version pirate, bien entendu. A peine quitté les salles il sera ensuite disponible sur des plateformes médias à la demande pour à peine moins cher qu'un ticket d'entrée au Kinepolis.

Le business modèle a bien changé en 15 ans, et peu importe  si "The Force Awaken" ne bat pas un record d'entrées la semaine de sa sortie (mondiale, cette fois-ci) en salle. Le break even de production du film sera atteint bien avant de récupérer les montants astronomiques investis dans la promotion de ce nouvel opus. Raison pour laquelle, bien plus qu'en 1999, les produits dérivés tous plus débiles les uns que les autres envahissent les étals.

Alors ok, félicitons nous d'avoir en 2015 accès chez nous, sur nos tablettes et compagnie, à du contenu multimédia haute qualité à un coup d'abonnement mensuel valant à peine 2 entrées de cinéma.

Et puis en même temps plaignons nous de cette société de l'immédiateté et du consumérisme à outrance.

Bref, bouffons la pilule bleue, suivons le lapin blanc, devenons Neo et renversons la Matrice. Ainsi, nous aurons droit aux épisodes de la prochaine saison de Game Of Thrones traduits avec les pieds, et en HD 4K de préférence.

dimanche 6 septembre 2015

Et si on donnait la parole aux réfugiés ?

Texte : Albin Wantier

Invasions sauvages, hordes de migrants, afflux ingérable pour la Belgique, menace pour notre sacro-sainte civilisation… Ces derniers jours, j’ai lu tout et n’importe quoi sur la question de l’accueil des réfugiés qui viennent frapper à notre porte. Pour en avoir le cœur net, accompagné de David Crunelle, nous sommes allés voir de nos propres yeux la situation de ces demandeurs d’asile qui se massent devant l’Office des Etrangers à Bruxelles. But de la démarche : prendre le temps de rencontrer les gens, écouter les histoires qu’ils veulent bien nous raconter, saisir la réalité du terrain et la restituer telle que nous l’avons vécue. 



















Vendredi 3 septembre, 10h30. En parcourant les larges avenues du quartier très « corporate » de la gare du Nord, à l’ombre des immenses tours de bureaux, difficile d’imaginer qu’à quelques mètres de là se jouent des scènes qu’on n'aurait jamais crues possibles sur le sol belge : des centaines de candidats réfugiés, amassés dans des tentes montées en catastrophe grâce à l’aide de bénévoles, au milieu d’un Parc Maximilien dont on n’aura finalement jamais autant parlé.



















Le contraste est saisissant. Dans le parc, par 12 ou 13 degrés, les réfugiés font la file les pieds dans la boue, à la recherche d’un manteau ou d’une paire de chaussures étanches. Les bénévoles sont nombreux. Ils réceptionnent les dons, trient, stockent et distribuent. D’autres montent des tentes, s’improvisent traducteurs ou cuisiniers. Le port des gants est de rigueur. La rumeur s’est vite répandue : des cas de gale auraient déjà été détectés. C’est qu’avant la mobilisation massive pour structurer ce camp, les candidats réfugiés étaient abandonnés à leur propre sort : ils dormaient à même le trottoir devant l’Office des Etrangers. Sans toilettes, il fallait bien faire ses besoins quelque part. Donc dans le parc… Sans intervention urgente, la situation déjà difficilement soutenable de ces demandeurs d’asile pourrait rapidement dégénérer en crise sanitaire et humanitaire. Les rats ne tarderont pas à rappliquer, les épidémies risquent de se régaler sur ces corps affaiblis par un voyage qui a souvent duré plusieurs semaines, dans des conditions qu’on trouverait déjà intolérables pour du bétail.



















En regardant droit devant soi, on se croirait plongé dans ces camps du Liban ou de Syrie. En levant la tête, la réalité vous frappe en plein visage. D’un côté le siège d’Electrabel, tour vitrée dans laquelle se reflètent les arbres du parc. De l’autre, la Tour Upsite censée incarner le renouveau du quartier du Canal, « déjà disponible à partir de 325.000 euros hors TVA pour un appartement une chambre ». Cette catastrophe humanitaire en devenir se déroule bel et bien au cœur de la capitale de l’Europe, en 2015, entre son quartier d’affaires et celui en pleine phase de gentrification. Les images sont dures lorsqu’elles viennent d’Irak. Sont-elles plus percutantes lorsqu’on les observe du 30e étage ? Une chambre avec vue sur la guerre, ça vaut combien ?

Chambre avec vue sur la guerre
Face à l’overdose de vérités et contre-vérités sur les réfugiés, nous voulons comprendre qui ils sont, d’où ils viennent, ce qu’ils ont enduré, ce qu’ils cherchent, comment se passe réellement un tel périple. Nous voulons des histoires, pas des images choc. Nous repérons des journalistes avides de sensationnalisme. L’un demande à un réfugié de lever sa chemise pour pouvoir filmer les cicatrices laissées par le voyage. Pas de ça pour nous.

Les premiers contacts sont assez distants. On commence avec un Mauritanien qui nous explique qu’il a eu plus de chance que les autres : il détient le fameux ticket qui lui permettra d’être reçu dès lundi à l’Office des Etrangers. Son dossier pourra être rapidement examiné, pense-t-il. Mais dès que nous proposons de le prendre en photo, il hésite, bien que toujours souriant. « Désolé les gars, mais j’ai appris à me méfier de tout le monde. »

Pour les autres entretiens, nous demandons l’accompagnement d’une traductrice parmi les bénévoles.   

Nous marchons à peine un mètre et déjà deux réfugiés irakiens acceptent de nous répondre. Haïder a 37 ans. Il est marié et a 5 enfants. Il a fui son pays lorsque sa maison a été rasée dans un bombardement. Jusqu’alors, il travaillait depuis 14 ans dans une petite société d’aménagement intérieur. Le village est maintenant en ruine, il faudra tout reconstruire avant qu’il puisse retrouver du travail. 

Une traversée trop dangereuse pour la famille
La famille d’Haïder est restée au pays : « Ma femme et mes enfants vivent actuellement avec mes parents. La situation sur place est très difficile. Nous subissons chaque jour les intimidations et les humiliations. Dans ce régime de la terreur, impossible de retrouver un travail sans devoir collaborer avec ceux qui nous humilient (NDA : et qu’il évite soigneusement de citer nommément). On veut donc venir en Europe pour travailler dans des conditions de respect de nos droits humains. Mais faire le voyage avec la famille, c’est beaucoup trop dangereux. Mon but, c’est d’obtenir des papiers ici, apprendre la langue et travailler. Je pourrai alors envoyer de l’argent à ma famille pour les aider. »

A ses côtés, Yassin, lui aussi 37 ans, confirme les dangers du voyage entre l’Irak et la Belgique. « Il m’a fallu 4 semaines pour arriver ici, entre les bateaux, les trajets à l’arrière de fourgons fermés et les traversées à pied. » Yassin est le premier à nous parler d’argent. Environ 3.000 euros pour traverser la Mer Egée entre la Turquie et la Grèce. A ce tarif, on comprend mieux aussi pourquoi ces hommes sont venus seuls. 


La misère du monde ?
Le prix du voyage balaie également l’argument de ceux qui s’étonnent de voir ces « soi disant pauvres réfugiés » l’oreille collée à un iPhone ou déambulant dans une paire de Nike. Les Irakiens les plus pauvres sont restés là-bas, ils crèvent sous les bombes. Les réfugiés, c’est la classe moyenne, ceux qui ont ou avaient un job, ont suivi des études et ont les moyens de débourser de telles sommes. Leur téléphone portable, c’est leur seul moyen de donner des nouvelles à la famille, mais aussi de s’informer sur les combines pour traverser une frontière. Dès qu’on a compris ça, on est moins étonné de rencontrer des candidats réfugiés qui nous demandent si on peut leur envoyer leurs portraits via Facebook, Viber ou Whatsapp. Le Belge moyen avait peut-être loupé l’épisode du développement économique qui ne s’est pas arrêté à nos frontières. Il s’attendait sans doute à les voir arriver à dos de chameau, en guenilles, c’est raté. « Accepter toute la misère du monde » comme on l’entend souvent ? Mais de quelle misère parle-t-on au juste ?







































Plus loin, d’autres Irakiens nous rejoignent, la conversation s’anime. A la méfiance des débuts succède désormais le besoin de partager l’histoire. « Tu dois raconter comment on arrive ici, tu dois leur dire qui sont ces gens qui nous entassent dans des bateaux pourris. » Toujours en Arabe, les discours deviennent plus longs, plus chargés en émotion aussi. La voix est plus tranchante, le regard plus décidé. La traductrice blêmit, leur demande de répéter plusieurs fois pour être sûre d’avoir bien compris. Elle nous explique : ceux-là ne veulent pas de photos, ne veulent pas être cités nommément, ne veulent pas qu’on puisse les reconnaître. Pourquoi ? Parce qu’avec ce qu’ils nous racontent, ils craignent les représailles. Les passeurs sont une mafia, un réseau. Ils craignent de recroiser la route de certains d’entre eux, même ici en Belgique.

Ils déballent tout, on relate. Anonymement, mot pour mot :

Sauvés par des pêcheurs
« Pour passer de Turquie en Grèce, c’est a priori très simple. Il ne faut même pas chercher les passeurs, ils viennent à nous, mais on ne les rencontre jamais personnellement. Des intermédiaires repèrent les candidats à la traversée, proposent un deal à l’un de nous et le bouche-à-oreille fait le reste. C’est un vrai business. On a donc embarqué de nuit et on est parti. Malheureusement, le bateau était en surcharge et il a commencé à prendre l’eau. Il y avait des enfants avec nous, ils hurlaient. Nous étions tous pris au piège, en pleine mer, dans un bateau en train de couler en pleine nuit, sans lumière. C’est un souvenir que je n’oublierai jamais. Heureusement, un bateau de pêcheurs nous a repérés et ils nous ont ramenés sains et saufs sur la côte grecque. Sans eux, nous nous serions tous noyés. C’était une expérience traumatisante. »


Coulés par des hommes masqués
« Nous, on a attendu deux semaines en Turquie avant de trouver un bateau. Finalement, on a pu trouver un deal. Il y avait 40 personnes dans notre groupe, nous avons payé 1600 euros par personne pour une traversée de nuit. Nous sommes venus au rendez-vous en bord de mer, mais personne ne s’est jamais présenté. Nous n’avons jamais retrouvé l’homme qui s’est envolé dans la nature avec notre argent. Il a empoché 1600 euros de quarante personnes, une vraie fortune. La même nuit, une autre personne – sans doute un complice – a proposé de nous faire traverser. Nous avons dû lui verser chacun 1200 euros. Il nous a aussi arnaqués : il avait promis de vrais bateaux, mais il est arrivé avec deux Zodiacs qui ont chacun embarqué 20 personnes. On est parti à 1 heure du matin, les deux Zodiacs se suivaient. En pleine mer, on a croisé un bateau. Les membres d’équipage étaient masqués. Ils ont percé la toile du Zodiac qui nous suivait et l’ont coulé. Nous étions sur le premier Zodiac, nous avons pu nous échapper. A 6 heures du matin, nous avons atteint les côtes grecques. Mais nous n’avons plus jamais eu de nouvelles de gens qui se trouvaient à bord du second Zodiac. Les rumeurs disent que ceux qui coulent les bateaux de réfugiés sont payés par la Grèce. C’est ce qui se dit parmi les réfugiés en tout cas. (NDA : plusieurs sites ont relaté des récits similaires, qui à ce stade n’ont jamais pu être vérifiés formellement). Quant à l’homme qui nous a volé notre argent avant la première tentative de traversée, il parlait Allemand. »

Changer de fourgon toutes les 4 heures
Nos interlocuteurs irakiens racontent tous avoir été emprisonnés pendant une semaine à leur arrivée en Grèce. Le temps semble-t-il de relever leurs empreintes digitales et de vérifier qu’ils ne faisaient l’objet d’aucun signalement, avant de les relâcher dans la nature. Ensuite, même scénario qu’en Turquie : des « intermédiaires » s’immiscent parmi les réfugiés et proposent de rallier l’Europe du Nord en camionnette.

« Il s’agissait plutôt de fourgons fermés, sans fenêtre et sans lumière, dans lesquels nous étions massés. Nous n’avions aucune idée de la destination. Toutes les quatre heures environ, le fourgon s’arrêtait et nous étions forcés de descendre sans savoir où nous nous trouvions. Il fallait alors attendre qu’un autre fourgon se présente, pour une autre étape de quatre heures. Et ainsi de suite. Il fallait parfois parcourir de longues distances à pied pour rallier un autre lieu de rendez-vous où nous attendait un chauffeur. Je sais que nous avons traversé la Macédoine, la Hongrie et l’Autriche. Au bout de 7 jours de voyage, le dernier fourgon s’est arrêté ici et nous a tous débarqués juste en face de l’Office des Etrangers. Nous n’avions pas la moindre idée de l’endroit où nous nous trouvions. Nous avons alors constaté que notre voyage s’était arrêté en Belgique, mais ce n’était pas un choix délibéré. Pour moi, peu importe où j’atterrissais. Je voulais juste trouver un pays qui respecte mes droits. Me voilà donc ici et j’attends maintenant de pouvoir introduire une demande officielle pour obtenir des papiers. »

Débarqués juste devant l’Office des Etrangers
Le récit est étonnant. Plusieurs de ces interlocuteurs nous ont confirmé avoir également été débarqués directement devant l’Office des Etrangers par leur passeur. Impossible de vérifier la véracité de propos qui pourtant interpellent. Nous poursuivons l’entretien et l’un de nos interlocuteurs nous interrompt : il pointe du doigt un fourgon noir, immatriculé en Belgique, qui ralentit à hauteur de l’Office des Etrangers. « C’est ce genre de camionnette ! » s’écrie-t-il. Le regard du chauffeur croise le nôtre, il accélère et passe son chemin. Passeur ou pas ? Impossible de le savoir.

Après avoir raconté cette histoire à Julien, l’un des coordinateurs de la plateforme de bénévoles active sur le terrain, celui-ci semblait tout aussi surpris que nous. Il tempère toutefois : « Si c’est vrai, c’est gravissime. Par contre, tous les réfugiés irakiens présents dans le Parc Maximilien ne sont pas arrivés ici par hasard. Ils sont nombreux à avoir choisi délibérément la Belgique. Ils pensent que c’est ici qu’ils ont le plus chance d’obtenir des papiers. Manifestement, ils n’ont pas été très bien informés. »

Parfaits bilingues
Nos entretiens se poursuivent dans le camp. Un jeune Afghan se présente spontanément… dans un néerlandais qui ferait pâlir de nombreux ministres francophones. Abdul Razaq a 23 ans. Il a quitté l’Afghanistan en 2012, après le massacre de sa famille. Le trajet jusqu’ici lui a coûté 4000 euros. Il a transité par l’Iran, la Turquie, la Grèce, l’Italie, la France et la Belgique. « A part les traversées entre la Turquie et la Grèce, puis entre la Grèce et l’Italie, je me suis débrouillé sans passeur » insiste-t-il.


Voilà trois ans qu’Abdul Razaq est en Belgique, dans l’attente d’une régularisation. Il s’est joint au mouvement des réfugiés du Parc Maximilien : « Depuis trois ans, je dors dans les parcs, les gares, les églises. Quand j’ai 2 euros, je vais prendre une douche à la piscine. J’ai appris le néerlandais. Je n’attends qu’une chose : obtenir des papiers. Je pourrai alors travailler ici. Je n’ai aucune envie de rentrer en Afghanistan. Ma vie est ici maintenant. »


Un autre groupe de jeunes Afghans s’invite dans la discussion… en français, cette fois ! Le plus âgé a 21 ans. Les autres entre 15 et 17 ans. Tareq, 17 ans, est arrivé il y a plusieurs mois. Comme ses camarades, il réside au « Petit Château », l’un des centres d’accueil de Fedasil à Bruxelles. Lui a quitté l’Afghanistan avec sa famille. Mais ces derniers sont restés en Turquie, à mi-chemin. Son avenir, c’est en Belgique qu’il le voit : « Ici, j’apprends la langue, je veux poursuivre mes études. J’ai toujours rêvé d’être policier, alors pourquoi pas ici en Belgique ? Si le métier de policier n’est pas possible pour moi, alors je peux me diriger vers d’autres secteurs. Tout m’intéresse : l’électricité ou la cuisine, c’est bon pour moi. » Comme ses camarades, un retour en Afghanistan est inconcevable : « Nous avons fui les menaces de Daech et des Talibans. Quand les extrémistes débarquent dans un village, les jeunes de notre âge sont enrôlés de force. Ceux qui refusent sont tués. »

Une richesse pour la Belgique
Zaccaria, 15 ans, est moins à l’aise en français. Il propose de continuer l’entretien dans un anglais qui nous cloue le bec : « Au Petit Château, nous sommes bien traités. Nous allons à l’école, on nous apprend la langue. C’est nécessaire pour pouvoir s’intégrer. Notre message est clair : si la Belgique nous accepte, nous les jeunes Afghans, nous voulons travailler ici, apporter notre contribution au pays. Nous sommes une richesse, pas une menace. Mais pour cela, nous avons besoin de papiers. »



Tous les Afghans que nous avons rencontrés déplorent une situation qu’ils trouvent injuste: la Belgique peine à reconnaître le statut de réfugié pour les Afghans. Dans l’état actuel des choses, leurs demandes ont moins de chances d’aboutir que celles introduites par des Syriens par exemple.








































Fuir la guerre en Syrie
Notre ronde se poursuit avec la rencontre de Joma’a, un Syrien de 35 ans tout juste arrivé à Bruxelles avec ses neveux et nièces. Dans les bras, il berce un petit garçon de quelques mois emmitouflé dans une couverture tout en répondant à nos questions. « Nous habitions à Homs. Je travaillais dans un laboratoire de soins dentaires, j’avais une bonne situation là-bas. Mais les bombardements ont détruit notre quartier. La plupart de nos amis sont décédés. Nous n’avions plus de maison. Pour nous, rester était devenu trop dangereux. »








































Joma’a et sa famille ont emprunté un itinéraire plutôt atypique pour arriver en Belgique : via l’Egypte, le Maghreb, l’Espagne et la France. Pour lui pourtant, la Belgique est un choix de destination qu’il assume totalement. « Nous avons déjà de la famille ici », poursuit-il. Entre l’Espagne et la Belgique, le récit de leur parcours rejoint celui des réfugiés irakiens croisés quelques minutes plus tôt : des étapes de 4 heures maximum, agglutinés dans des fourgons fermés.







































Voilà deux heures que nous discutons avec les réfugiés. Hala, notre traductrice, s’excuse : « Je vais m’écrouler si je ne mange pas. » Nous en restons donc là pour les traductions. Elle accepte toutefois de nous expliquer son parcours. Libanaise, 26 ans, Hala termine ses études en Belgique. Voilà trois jours qu’elle est présente sur le camp. 

« Je ne pouvais plus supporter les images de réfugiés sur les trottoirs, il fallait agir. Je me suis présentée spontanément au camp et j’ai proposé mes services de traduction. » Et pas que… Tout en traduisant, Hala continue à aiguiller les dons qui arrivent pas dizaines. Elle n’a pas une seconde de répit. Il faut dire que les crises humanitaires, elle connaît. En 2006 déjà, elle s’est engagée comme bénévole au Liban pour accompagner l’afflux de réfugiés palestiniens qui fuyaient les bombardements. De là à penser que des situations similaires – toutes proportions gardées – arriveraient à Bruxelles…

Car c’est bien de cela qu’il s’agit : une crise humanitaire qui se déroule sous nos fenêtres. On ne peut pourtant s’empêcher de penser qu’il suffirait de « quelques minutes de courage politique » pour régler le problème. Sur place, on dénombrerait entre 500 et 1000 réfugiés. On est ici loin, très loin, des images de marées humaines incontrôlables telles qu’on a pu en voir à Budapest. Dans le parc règne un certain calme, pour l’instant. D’ailleurs, un œil non averti pourrait tout à fait traverser ce quartier de Bruxelles sans remarquer ce qui se joue dans le parc. Nous nous attendions à trouver des réfugiés partout à chaque coin de rue. Pas du tout. Tous restent bien confinés sur la surface qu’ils occupent.

A l’heure où nous quittons le parc, les réfugiés font la file pour obtenir un sandwich, un bol de soupe, un fruit ou un thé. De l’autre côté du boulevard, les employés d’Electrabel font aussi la file. Devant un foodtruck garé face à leur bâtiment. Douce ironie.

Nous espérons que ce récit et ces portraits auront permis d’apporter quelques éléments de réponse aux questions que se posent (parfois) à raison de nombreux concitoyens. Résumons :

Pourquoi tant d’hommes seuls ? Parce qu’ils sont conscients des dangers et veulent épargner leur famille.
Pourquoi ont-ils des smartphones dernier cri et des vêtements de marque ? Parce que seule la classe moyenne peut se permettre de payer les passeurs et venir chez nous.
Pouvons-nous accepter toute la misère du monde ? Ce n’est pas la misère. Les plus pauvres sont restés là-bas et mourront sous les bombes.
Ne risquent-ils pas d’imposer la sharia chez nous ? C’est justement ce qu’ils fuient chez eux.

Pour le reste, nous vous laissons juger par vous-mêmes.


Photos : DavidCrunelle


POST SCRIPTUM
Après avoir conclu ce récit, quelques précisions s’imposent.

Primo, nous tenons à expliquer pourquoi aucune femme ne figure dans nos portraits. Moins nombreuses que les hommes certes, les femmes sont toutefois bien présentes dans le camp. Question de culture sans doute, aucune ne se sentait à l’aise pour répondre à nos questions ou se faire photographier. La plupart s’occupaient des enfants. Nous aurions sincèrement voulu récolter l’un ou l’autre témoignage féminin. Peut-être une prochaine fois.

Secundo, notre visite du camp nous a également sensibilisés sur les besoins urgents humains sur place. Dès le lendemain, avec plusieurs amis, nous y sommes retournés pour apporter notre aide. Et nous y retournerons tant qu’on aura besoin de nous. La description de l’organisation du camp suivra dans un prochain récit détaillé. L’impression qui en ressort est celle d’un joyeux bordel, qui tient avec des bouts de ficelles, et des bénévoles qui se démènent pour assumer des missions qui devraient normalement être celles de l’Etat.


Tertio, l’afflux chaotique de dons pose un vrai problème d’organisation dans le camp du Parc Maximilien. Chaque jour, de nouveaux besoins spécifiques se font ressentir. Mais il est impossible de les anticiper. Si vous souhaitez apporter votre aide, plusieurs pages Facebook recensent, pratiquement heure par heure, les appels aux dons et aux bénévoles :





jeudi 6 août 2015

Comparatif de l'idée simple

Le logo du Théâtre de Liège a-t-il été plagié par les organisateurs des Jeux Olympique de Tokyo 2020?


OU

L'identité visuelle d'un petit théâtre de la deuxième plus grande ville de Wallonie a-t-elle été scandaleusement spoliée par le mastodonte Japonais en charge de l'organisation de l'évènement sportif mondial le plus médiatisé des prochaines années?

Lorsque cette info est apparue, ma première réaction a été plutôt dubitative, car je n'y voyais pas le scandale mondial que les médias semblaient dénoncer.
Certes les deux identités visuelles concernées se ressemblent. Elles se ressemblent à ce point que les comparatifs illustrant les divers articles concernant l'affaire du siècle nous pousseraient presque à n'y voir qu'un évident plagiat. 
Mais ces deux identités sont-elles si proches que cela? Il suffit de remonter le process créatif pour répondre partiellement à cette question.

Tout d'abord le logo du Théâtre de Liège, résulte d'une idée simple (simpliste) fréquemment issue du brief des clients : faire un logo avec les premières lettres qui composent un nom. Les graphistes aiment ou détestent ce genre de requête. D'un côté cela bride complètement le talent créatif de certains, de l'autre cela pose des bases de travail. Si le graphiste sait qu'il doit absolument jouer autour d'une ou plusieurs lettres pour fabriquer une identité visuelle, il aura un point de départ clair pour son processus créatif. Libre à lui d'ensuite agrémenter cela d'éléments graphiques permettant l'élaboration d'une identité forte et différenciante, comme par exemple la localisation, le thème, l'époque, le pays, etc. 

Le logo du Théâtre de Liège est un bon exemple de ce process. Des deux lettres de départ, il n'en reste qu'une jouant avec negative zone, meilleur effet de manche pour rendre un logo 'malin'. 




La fonte (la typo, la police, moi je suis old school et j'appelle toujours ça 'fonte'.) utilisée est une police avec sérifs des plus courantes, dont la traverse du "T" et du "L" sont identiques. C'est le cas des principales fontes installées par défaut dans vos ordinateurs depuis Windows 3.1... 
Le sérif des traverses du "T/L" étant courbé proportionnellement au cercle entourant le logo rend celui-ci d'autant plus moderne et efficace. 


Il en ressort une identité visuelle différenciante de la multitude des logos de théâtres exploitant plus ou moins maladroitement ces deux visages stupides et moyenâgeux. Sur ce coup là, on ne peut que féliciter tant le graphiste que le Théâtre de Liège de s'être éloigné de ce cliché devenu ridicule.





Par contre la fonte utilisée en dessous semble être de l'Egyptienne FLT romain et bold. Soit une autre fonte utilisée que pour la conception du logo. On y reviendra.






L'identité visuelle des Jeux de Tokyo 2020, et plus précisément son logo incriminé est conçu également sur les bases d'une idée simple/simpliste, à savoir un "homage" aux références de la typographie que furent l'italien Bodoni et le français Didot. Une drôle d'idée de représenter les valeurs du sport en citant de telles références, d'autant plus que ces deux typographes se disputent encore l'originalité de leurs créations étrangement apparues à la même époque. 






La fonte utilisée pour le nom de l'évènement en dessous du logo est du Clarendon, autre fonte avec sérifs créée par un Américain près d'un siècle après les augustes références de la typographie mentionnées précédemment. Créer un logo sur base d'une fonte est une idée en soit qui, une fois "mélangée" avec une autre fonte représente pour de nombreux graphistes une sorte de faute, mais le débat n'est pas là. 



Un logo avec comme point de départ la première lettre d'un nom. Voilà donc ce qu'est le logo de Tokyo 2020. Le "T" se chargeant de représenter "Tokyo", "Tomorrow", "Together", "Team", on pourrait continuer le délire justificatif beaucoup plus loin.



Point commun avec le logo du Théatre de Liège : c'est donc bel et bien, ici aussi, la même idée simpliste à la base de ce logo. Mais fort heureusement pour lui, Kenjiro Sano a agrémenté son logo de (vraies) références plus logique : l'or (en haut) et le l'argent (en bas) en espèce de ying yang, et puis bien sûr le soleil levant.

Voilà.


Les idées simples peuvent être efficaces, mais risquent très logiquement d'engendrer des similitudes malheureuses. J'y faisais d'ailleurs référence lors d'un précédent post sur l'identité visuelle de Proximus. Dès lors, d'une idée simple identique, les deux identités visuelles concernées ici se retrouvent confrontées à une évidente similitude, tout comme cela est le cas pour des milliers d'autres logos. S'agit-il d'un scandaleux plagiat pour autant? 




Rappelons que l'on parle ici d'une idée de base pour un logo et pas d'une identité visuelle complète. Mon avis est qu'il n'est en rien plagié - mais peut-être inspiré -, le graphiste incriminé s'étant rendu coupable (et ce à plusieurs reprises, voir liens ci-dessous) d'une idée simpliste mais efficace pour débuter la conception de son suspicieux logo. Absolument tous les autres éléments de l'identité visuelle des Jeux 2020 ne correspondent en rien au logo et à l'identité visuelle du Théâtre de Liège, n'en déplaise aux médias. 

Avis purement subjectif : le logo des jeux paralympiques de Tokyo 2020 est meilleur, et c'est celui là qui aurait du être utilisé comme identité principale. Il est graphiquement plus abouti, plus percutant, plus malin. D'ailleurs, je ne pense pas un instant que le débat aurait été aussi virulent si c'est celui-là qui avait été comparé au logo liégeois. Pourtant, cette version alternative exploitent les mêmes éléments de conception que son frère incriminé...





Maintenant qu'aurais-je fait à la place d'Olivier Debie et de son employeur si je m'étais retrouvé dans une telle situation? D'abord, j'aurais probablement été fort estomaqué par la similitude du logo créé il y a quelques années avec cette identité japonaise flambant neuve. Ensuite, et sans pressions/influences externes, j'aurais cherché les éléments différenciants entre ces deux logos, qui m'auraient rapidement permis de voir ces éléments qui distinguent de manière évidente la conception du logo incriminé.
Finalement, je profiterais pleinement du fait d'avoir élaboré il y a 4 ans une identité visuelle qui tient toujours la route et qui est comparée aux récentes créations destinées à des évènements mondiaux. 
Facile à dire, quand on sait que l'identité visuelle (et pas juste le 'logo') qui fait débat aura coûté 700.000€. Mais jusqu'à preuve du contraire, quand il n'y a pas plagiat, il n'y a pas plagiat.


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Mise à jour : "Olivier Debie va assigner le CIO devant la justice belge", une démarche qu'il justifie en disant : "Tant mon avocat que moi-même estimons que Monsieur Sano n'a donné aucune explication qui lui aurait permis de prouver l'itinéraire ou le cheminement artistique de sa création".

Croyez bien que je comprends cette démarche et partage le malaise que peut engendrer cette situation. Mais en effectuant une étude à peine plus poussée, je confirme que, selon moi bien sûr, il s'agit d'une coincidence issue d'une même idée de départ. Tous les autres éléments du logo Tokyo 2020 sont assez différenciants que pour lui donner une identité propre :





Mise à jour : 

Lors de son interview télévisée, Olivier Debie feuillette un des célèbres livres "Los Logos" (à savoir le numéro 2 et 3 qui trônent au dessus de son bureau). Il faut savoir que ce genre de livre, regroupant quantités impressionnantes d'exemples créatifs est l'outil de base utilisé fréquemment par les graphistes pour "s'inspirer" avant un process créatif. Cela sert à construire les bases graphique d'un nouveau projet et il n'y a rien de mal à y trouver. C'est très fréquent, à tel point que le graphiste "lésé" dans cette histoire de "plagiat" n'a aucun soucis à montrer cela devant des caméras.

Mais dès lors, il faut distinguer hommage, inspiration, coincidence et plagiat. 





Et ici quelques liens pour montrer à quel point Kenjiro Sano n'est de toute façon pas un grand créatif :


http://blog.livedoor.jp/wisdomkeeper/

http://wall0.com/livetbs/1439086312/
http://alfalfalfa.com/articles/127294.html

jeudi 23 avril 2015

Crowdsourcing's source



Dans un précédent post, je m'émerveillais de la réussite d'Eyeem pour son partenariat avec la prestigieuse banque d'image Getty, et leur système de crowdsourcing via leur Eyeem Market. Depuis presque un an, ce système permet à de nombreux photographes (professionnels ou amateurs) de générer des revenus en ajoutant leurs compositions dans le catalogue de la plus grande banque d'image au monde (qui a récemment avalée le très populaire istockphoto).

In a previous post, I mesmerized of Eyeem's success about their partnership with prestigious image bank Getty, and the crowdsourcing service through Eyeem Market. Since almost a year, this service allows many professional and amateur photographers to generate incomes by adding their compositions in the catalog of the largest image bank in the world (which recently swallowed the popular istockphoto).


Le succès est tel que j'ai consacré cette année dans mon cours d'Initiation à la Photographie une partie toujours plus importante à la photographie mobile et plus particulièrement au premier concurrent d'Instagram.

The success is such that I have dedicated this year in my Introduction to Photography course an increasingly important part in mobile photography and more specifically about Instagram's first competitor.


Ayant peu à peu décidé de ne plus m'attarder sur autre chose que la photographie mobile, je continue de soumettre des photos semi régulièrement, tout en vantant les mérites de cet Eyeem Market autour de moi. Une grosse vingtaine d'amis/connaissances a d'ailleurs rejoint l'application de la startup berlinoise.

Having gradually decided not to dwell on anything other than mobile photography, I continue to submit photos semi regularly while touting this EyeEm Market around me. A couple dozens of friends / acquaintances has also joined the application of the Berlin startup.

Les photos vendues se retrouvent (pour celles dont on peut tracer l'utilisation finale, bien sûr) sur des sites où elles illustrent souvent un thème bien éloigné de leur origine. Dès lors, toujours soucieux de démontrer à quel point tout est sujet à photographie, j'indique ici l'origine des dernières photos vendues depuis le catalogue Getty, en précisant le lieu, le moment et la situation de la prise de vue.

The pictures sold are found (for those we can trace the ultimate use, of course) on sites where they often show a far distant theme of their origin. Therefore, always careful to show how everything is subject to photograph, I indicate here the origin of the latest photos sold in the Getty catalog, specifying the place, time and circumstances of the shooting. 

Le cours de photo que je dispense depuis quelques années vise principalement à développer le regard des étudiants, à faire la distinction entre le bon et le moins bon, à observer la matière et les formes. Toujours dans la même optique de leur démontrer qu'il n'est pas nécessaire d'avoir du bon matériel ni se trouver dans des lieux atypiques pour créer une composition graphique intéressante. Une page dédiée sur Behance me sert d'ailleurs de support à cet effet.

The photography course that I taught since a few years now focuses on developing the eyes of students, to distinguish between the good and less good, observing material and shapes. Also to demonstrate that it is not necessary to have expensive equipment or be in unusual venues to create an interesting graphic composition. A dedicated Behance page serves me also in this purpose.



Mur de projections psychédéliques aléatoires lors d'une exposition à la Villa Empain
Psychedelic random video installation in an art show in Brussels


Pont permettant de changer de quai de métro à Chicago
Bridge between two train tracks in Chicago


Sièges de la Friends Arena de Stockholm à la sortie du concert de Pearl Jam
Empty seats in the Friends Arena after a Pearl Jam show in Stockholm

Concert de noise au Magasin 4 à Bruxelles
Noise rock show at Magasin 4 in Brussels

Une des multiples photos de café prise dans le même bureau de Bruxelles.
Les autres sont disponibles ici. 
One of the numerous coffee shots taken in the same boring office in Brussels
More available here.

La décoration d'une lampe cassée dans le hall de Partena Mut, à Trône...
Broken lamp decoration in a hall of a social office in Brussels.

Magasin de fournitures de bureau à Stockholm.
Office supplies shop in Stockholm.

Etal d'un couturier à New York.
Tailor stall in New York. 

Un paquet de nachos dans un Chipotle de Brooklyn.
A bag of nachos in a Chipotle of Brooklyn. 

L'hiver au Square de Meeus à Bruxelles.
Winter trees during lunchtime in Brussels. 

Le menu du Sushi Shop et leurs affreux sushis.
A sushi menu with chopsticks in Brussels. 


Un album de Motorpsycho qui tourne sur ma platine Pro-Ject.
A Motorpsycho record on a Pro-Ject turntable.  

Terrasse du café du Van Abbemuseum de Eindhoven.
Outside lunch at the Van Abbeluseum terrasse in Eindhoven. 

Un des panneaux publicitaires près du Clos du Parnasse, à Ixelles.
Damaged advertising wall in Brussels.

Une pile de crayons emballés dans des journaux, sur un marché d'Istanbul.
A pile of pencils wrapped in newspaper, in an Istanbul market.